mardi 23 août 2016

Une petite preuve d’amour…





Au tout début de notre vie à deux, j’avais réussi à convaincre mon nouveau mari à m’accompagner au marché aux puces qui se trouvait au sous-sol d’une église à quelques rues de notre petit appartement.  J’ai toujours aimé fouiner dans ce genre d’environnement, les marchés aux puces, les ventes de charité, de garage, vide grenier, vente-débarras, etc., tout ce qui avait le potentiel d’offrir du « beau, bon, pas cher ». 

Je ne pouvais pas m’imaginer que quelqu’un puisse ne pas aimer ça.  Après tout, on y trouve toutes sortes d’objets intéressants, commodes, utiles – souvent presque neufs – à des prix abordables sinon carrément dérisoires!  Et puis, cela fait moins mal au cœur si on décide de s’en défaire – ça n’a presque rien coûté!

Quoi qu’il en soit, tout en éprouvant le doux sentiment de satisfaction qui accompagne cette quête de l’article spécial… j’ai aperçu, en furetant, un pichet en verre taillé qui me faisait beaucoup penser à certains morceaux de vaisselle de ma mère.  En fait il y avait là deux de ces pots, identiques, et au coût de seulement deux dollars chacun.



Nous venions de nous marier, nous n’avions pas beaucoup de sous, et même quatre petits dollars risquaient de mettre notre budget à l’épreuve.  Donc, je me suis dit que je n’avais pas besoin de deux pichets, mais que ce serait certainement très utile d’en avoir au moins un.  Et nous sommes repartis, portant fièrement notre « nouvelle » acquisition.

Au fil des ans, la famille s’est multipliée, notre maison s’est agrandie considérablement ainsi que notre mobilier, et nous voilà équipés d’une table de dix pieds (trois mètres) de long!  Je regardais mon pot à eau qui se retrouvait automatiquement à l’autre bout de cette longue table, ou bien que je devais constamment remplir, et je pensais à ce deuxième pot, regrettant vivement de ne pas l’avoir acheté aussi quand l’occasion s’était présentée.

Pendant ce temps, il se trouve que je passais souvent devant cette même église car elle était sur la route que j’empruntais depuis vingt ans pour aller au travail.  Deux fois par année, je voyais un écriteau érigé devant le bâtiment de cette église, annonçant ce marché aux puces.  Pendant plusieurs années, je passais devant en pensant à ce pichet, mais les heures d’ouverture étant presque les mêmes que mes heures de travail, je me raisonnais en me disant qu’après maintenant 35 ans, il était absolument impossible qu’il y soit encore.

Cependant, voilà qu’un beau samedi matin, je me suis dit qu’en partant tôt, j’aurais près de 20 minutes pour aller y faire un petit tour – juste pour voir.  J’y suis entrée en courant, abasourdie devant tant de tables – je ne pourrais jamais faire le tour en 15 minutes (5 bonnes minutes étaient passées à stationner et à trouver l’entrée)!  Puis soudain, j’ai eu le souffle coupé en apercevant « mon » pichet sur une table – identique, sans une seule égratignure ni aucun éclat!  Mais par contre, il n’était plus marqué à deux dollars… il coûtait maintenant vingt-cinq dollars!  Vingt-cinq dollars que je n’avais pas.

J’ai dû quitter pour arriver à l’heure au boulot, déçue mais excitée, incrédule, me disant que ce n’était presque pas possible, que je devais rêver!

J’ai pris le téléphone, car il me fallait absolument raconter cette aventure à quelqu’un, et j’ai appelé mon mari.

Connaissant maintenant mieux mon époux, je savais à présent que ce genre de chose ne l’intéressait pas – et encore moins quand ça vient d’un « marché de déchets ».  À ses yeux, ce ne sont que des trucs de plus pour encombrer la maison.

Mais, je l’ai appelé quand-même, ne serait-ce que pour lui faire revivre un beau souvenir de nos premiers jours!

Le travail m’interpellait, donc je me suis mise à l’ordinateur, heureuse d’entendre enfin la porte s’ouvrir, annonçant mon premier client de la journée.  Relevant les yeux pour l’accueillir, je vis mon cher et tendre entrer en portant un paquet.

Aujourd’hui, il y a deux pichets identiques sur ma table à manger!  Et chaque fois que je les vois, je ressens un petit pincement de tendresse au cœur! 

Un petit pincement qui me rappelle que, l’amour fait pour les autres ce qu’il aimerait qu’on fasse pour lui.

Et aussi, que les attentions spéciales qui sont prodiguées de manière désintéressée sont certainement une belle petite preuve d’amour!




Grand-maman Priscille

1 commentaire:

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