Au temps de mon enfance, les liens qui nous unissaient, mes deux sœurs,
mon frère et moi, n’étaient pas tissés serrés.
Avec les années, et la maturité, nous avons pris connaissance de
l’importance qu’a la famille et nous avons travaillé à établir une relation et
un rapprochement entre nous.
Malheureusement, à présent, nous n’avons plus autant l’occasion de nous
voir, mais quand nous en avons l’opportunité,
nous sommes toujours très heureux de nous serrer dans les bras les uns des
autres.
Certes, nous avons eu nos moments de désaccord, de querelles, et plus
jeunes, nos bagarres brutalement physiques!
Au fil des ans, nous avons eu nos périodes de frustrations, de
divergences, de froids et de ruptures où nous avons pris nos distances pour un
temps. Cependant, à chaque fois que
cela se produisait, ce n’était que « pour un temps » car il nous
était impératif de rétablir la relation entre nous.
Rétablir une relation brisée exige d’une part, de l’humilité, la prise
de conscience de ses torts avec une demande de pardon, et de l’autre part, le désir de refermer la
blessure en pardonnant, tout en admettant que personne n’est parfait. J’ai dû personnellement franchir chacune de ces
étapes à plusieurs reprises. Mais quels
bienfaits en découlent et s’ensuivent!
La vie est trop courte pour accumuler des ressentiments et des rancunes.
Lorsque nos enfants étaient très jeunes, nos quatre familles et ma mère
avions pris l’habitude de réserver deux ou trois jours entre Noël et le Jour de
l’An afin de passer du temps ensemble. N’ayant
pas l’occasion de nous fréquenter au cours de l’année, vue le trajet qui nous
séparait ainsi que nos occupations respectives, nous nous réunissions dès lors,
soit chez l’un, soit chez l’autre. Nous
nous entassions un peu partout et c’était sensiblement comme faire du
camping! Certains devaient coucher par
terre sur des matelas improvisés ou dans un sac à couchage!
Nos enfants apprenaient à se connaître et à bâtir des liens entre
cousins et cousines. Oh, il y a bien eu
quelques escarmouches entre eux mais
tout finissait par s’arranger! Je garde
de merveilleux souvenirs de cette époque.
Nous préparions évidemment, le copieux repas du Temps des Fêtes, la
traditionnelle dinde avec jambon – tout le tra-la-la! Une année, j’avais décidé de faire différent
et j’avais préparé des mets chinois, mais la coutume est revenue au galop! Plusieurs années plus tard, on demandait à
tous d’apporter un plat afin d’alléger la tâche de l’hôtesse.
De surcroît, en guise d’activité afin de remplir le temps passé
ensemble, chaque famille préparait des chants, des pièces musicales ou des
sketches à présenter et nous disposions d’un temps de « spectacle ».
Nous prenions également du temps pour chanter
en harmonie tous ensemble au son de guitares, piano, violon, violoncelle,
harmonica, tambourine et autres instruments.
Et, il ne faut pas oublier les heures passées à jouer à des jeux de
société tels que « Scrabble » et « Yum » et la fois où
– par un froid de canard – nous sommes allés chez le voisin pour faire un tour
de traîneau tiré par ses chevaux!
Je me souviens d’une année en particulier où mon époux et moi avions offert
à notre fils – âgé d’à peu près sept ans – un jeu de hockey sur table. Le pauvre n’a pu y jouer qu’une ou deux fois
au cours du séjour de la parenté : les oncles se sont jetés sur le jeu
comme des lions sur un quartier de viande et l’ont monopolisé sans pitié durant
les trois jours!
À tous les ans, sans exception, Oncle R. arrivait enrhumé. De plus, n’ayant qu’une salle de bain, nous
nous dépêchions de nous y rendre avant que ce même Oncle R. s’y installe avec
un bon livre…!
Mais voilà qu’au fil des années, nos enfants ont grandi, se sont mariés,
ont commencé à fonder leurs propres familles.
C’était devenu impossible de tous se réunir pendant plusieurs jours,
alors il a fallu changer de méthode. Il
a été décidé d’un commun accord, de se réunir seulement au Jour de l’An, ce qui
s’est fait pendant plusieurs années d’affilée.
Là encore, les choses se sont mises à évoluer et le nombre des
petits-enfants a considérablement augmenté, ce qui rendait d’autant plus
compliqués le choix de l’endroit, et autres détails. Nous en étions réduits à offrir un repas
style « buffet », n’ayant plus suffisamment d’espace pour asseoir
tous les invités autour d’une table.
Malheureusement, nous nous sommes
essoufflés en cours de route. Les ainés, c’est
à dire mes sœurs et mon frère, leurs conjoints ainsi que mon époux et moi-même
avons alors pris la décision, après concertation, de ne plus appliquer cette
formule et de simplifier la tâche. D’autant
plus que chaque famille de son côté organisait sa fête de Noël avec ses enfants
et petits-enfants, ce qui représentait déjà pour moi et mon mari la préparation
et un souper pour 18 personnes!
La dernière année où nous avons accueilli la parenté au complet chez
nous, nous étions tout près de 39 personnes.
Aujourd’hui, nous serions environ une cinquantaine! Tous ceux qui ont connu cette époque en
gardent de bons souvenirs!
À présent, nous travaillons à cultiver les liens entre nos propres enfants
et nos 12 petits-enfants. Il va de soi
que le nombre augmentera dans le futur, puisque l’ainée de nos petits-enfants a
déjà 20 ans et celui qui la suit en a 17 – il faut donc certainement s’attendre
à ce que des amis de cœur et des conjoints se rajoutent dans un avenir plus ou
moins rapproché!
Je découvre que c’est un don, une grâce, de pouvoir tisser, entretenir
et maintenir des liens avec nos proches.
Quelle tristesse d’entendre de nos amis nous avouer que leurs enfants et
petits-enfants ne les côtoient pas du tout.
Il est vrai que d’entreprendre un tel rassemblement est une corvée. C’est laborieux, requérant de la
planification du repas, des jeux et des distractions pour les enfants – jeunes
et moins jeunes. Cependant, selon mon
expérience, la fin en justifie les exigences, c’est une réelle bénédiction!
Cette semaine j’ai eu la grande surprise et l’immense bonheur
d‘accueillir mes deux sœurs accompagnées de mon frère et ma belle-sœur! Ils ont désiré me surprendre à l’occasion de
mon anniversaire de naissance! Cela
faisait vraiment longtemps que nous ne nous étions pas rassemblées, mais rien
n’avait changé – nous étions tout aussi heureux de nous revoir!
J’éprouve une grande reconnaissance d’avoir de la famille, des « proches »,
qui ne le sont pas seulement de nom mais de façon tangible! Quelle joie, quelle bénédiction d’avoir pu préserver
notre relation fraternelle tout au long des années – malgré l’éloignement
physique qui nous sépare en terme concret de kilométrage – et néanmoins, d’être
demeurés une parenté unie!
P.S. Je tiens à remercier mon aînée ainsi que ma sœur
J. pour le prêt de la majorité de ces belles photos.
Grand-maman Priscille